Accéder au contenu principal

Le Conseil constitutionnel censure un tiers de la loi d'orientation agricole

Le Conseil constitutionnel a censuré jeudi, totalement ou partiellement, près d'un tiers des articles de la loi d'orientation agricole, dont plusieurs mesures censées consacrer le principe de "souveraineté alimentaire" ou répondre à la colère des agriculteurs sur le poids des contrôles et des normes.

Le Conseil constitutionnel a rendu hier, le jeudi 20 mars 2025, sa première décision sur un texte de loi depuis l’arrivée de Richard Ferrand à sa présidence. Cette décision porte sur la loi d’orientation agricole dont 14 articles sont totalement censurés par les Sages, et trois partiellement.

En réponse à une saisine des députés LFI et Écologiste

Cette décision du Conseil constitutionnel répond à une saisine déposée par les députés des groupes LFI et Écologiste. « C’est une petite victoire, face à tant de reculs environnementaux que proposait cette loi d’orientation agricole », a réagi Benoît Biteau, député écologiste de la Charente-Maritime.

Cette loi d’orientation agricole était très attendue pour répondre au mouvement de colère agricole. Adoptée par le Parlement au pas de charge avant le Salon de l’agriculture, elle consacrait la « bonne foi » présumée des agriculteurs lors des contrôles, une question qui a concentré les crispations des agriculteurs, notamment de la Coordination rurale, qui souhaite la disparition de la police de l’environnement (OFB).

Le Conseil constitutionnel a censuré cette disposition ainsi que la présomption de « non-intentionnalité » pour certaines atteintes à l’environnement. Les Sages ont toutefois maintenu la dépénalisation de certaines atteintes à l’environnement, lorsqu’elles ne sont pas commises « de manière intentionnelle », au profit d’une amende administrative de 450 euros au maximum, ou du suivi d’un stage de sensibilisation.

La souveraineté alimentaire en balance

Les sages ont surtout rejeté le principe contesté de « non-régression de la souveraineté alimentaire », miroir de la non-régression environnementale déjà consacrée. L’ambition centrale de la loi pour ériger « la protection, la valorisation et le développement de l’agriculture » au rang d'« intérêt général majeur » et d'"intérêt fondamental de la Nation », demande de la FNSEA syndicat agricole historique, n’a, elle, pas été censurée.

La « non-régression de la souveraineté alimentaire » avait été ajoutée par les sénateurs. Des élus et des juristes doutaient toutefois de la portée du dispositif, la protection de l’environnement ayant une valeur constitutionnelle, alors que cet « intérêt général majeur » est inscrit dans une loi simple.

Selon le ministère de l’Agriculture, la « non-régression de la souveraineté alimentaire » est toutefois « validée de manière opérationnelle à travers les conférences de la souveraineté alimentaire » annoncées par la ministre. « La LOA va enfin entrer en vigueur ! L’essentiel des mesures concrètes pour les agriculteurs a été validé. […] Les censures prononcées sont essentiellement liées à de purs motifs de forme et ne marquent pas l’enterrement des mesures proposées », s’est réjouie la ministre de l’Agriculture Annie Genevard sur son compte X (anciennement Twitter) après l’annonce du Conseil constitutionnel.

Les normes environnementales

Est aussi censurée une disposition qui prévoyait, sous certaines conditions et si elles n’engendrent pas de « concurrence déloyale », que les « normes réglementaires en matière d’agriculture ne peuvent aller au-delà des exigences minimales des normes européennes ». Cela répondait à la demande des syndicats agricoles FNSEA, JA et Coordination rurale d’arrêter la « surtransposition » des normes européennes, notamment en matière de produits phytosanitaires.

« Mes seuls regrets sont la suppression des principes de non-régression de la souveraineté alimentaire et de non-surtransposition, car c’est aujourd’hui l’origine du mal », a déclaré Laurent Duplomb (LR), rapporteur de la loi au Sénat où il a très largement contribué au remaniement du texte. « Le texte final redonne tout de même un nouveau cap à notre agriculture […] en infléchissant une certaine façon de penser », qui a laissé de côté « l’agroécologie », selon lui.

Le Conseil constitutionnel a jugé conformes deux mesures particulièrement décriées par la gauche et les écologistes. L’une qui invite le gouvernement à « s’abstenir d’interdire les usages de produits phytopharmaceutiques autorisés par l’Union européenne » en l’absence d’alternatives viables, une traduction du principe « pas d’interdiction sans solution », mantra de la FNSEA. L’autre accordant aussi une présomption d’urgence en cas de contentieux sur la construction d’une réserve d’eau.

L’exclusion des bâtiments agricoles du décompte de l’artificialisation des sols dans le cadre du dispositif « zéro artificialisation nette » a, elle, été censurée. L’article a été jugé « cavalier », c’est-à-dire sans lien suffisant avec le texte. Le texte prévoit aussi une simplification de la législation sur les haies et la création d’un guichet unique départemental - « France Services Agriculture » - pour faciliter les installations d’agriculteurs ou les cessions d’exploitation. Les articles concernés n’avaient pas été contestés.

Site EditionsLégislatives 05/03/2025

Ces contenus peuvent vous intéresser

Le cédant de parts d'une SARL ne peut pas invoquer le défaut de notification du projet de cession

En savoir plus

La réforme des retraites agricoles entraine une modification du mode de calcul des cotisations vieillesse

En savoir plus

Les règles relatives aux élections MSA sont précisées

Du 5 au 16 mai 2025, les adhérents de la Mutualité Sociale Agricole (MSA) seront appelés à voter pour choisir leurs délégués MSA, qui les accompagneront et les...
En savoir plus

Qualité d'associé du conjoint commun en biens : précision sur la renonciation tacite

En savoir plus

Éléments 1, 2, 3, 4 sur 4 accessibles