


Sociétés civiles : du changement en matière de nullité au 1er octobre 2025
Publié le 17.04.2025
Prise en application de l’article 26 de la loi n° 2024-537 du 13 juin 2024 visant à accroître le financement des entreprises et l’attractivité de la France, une ordonnance du 12 mars 2025 a procédé à une réforme du régime des nullités en droit des sociétés.
Ce texte a été pris à la suite du constat fait par les praticiens que l’actuel régime des nullités en droit des sociétés est source de complexité, d’incertitudes et de risques. En effet, comme le souligne le rapport relatif à l’ordonnance, la nullité d’une décision de la société, qui a pour objet de corriger une irrégularité, peut entraîner d’importantes conséquences négatives pour la société. Elle est notamment susceptible de produire une nullité en cascade de l’ensemble des décisions qui découlent de la première, et de fragiliser ainsi la situation de la société et de ses parties prenantes.
L’ordonnance sera applicable à compter du 1er octobre 2025 (Ord., art. 70).
Mise en place d’un « triple test » exercé par le juge
En réécrivant notamment les articles 1844-10 à 1844-17 du code civil, la réforme a pour objectif principal de sécuriser les décisions sociales et de cantonner les nullités susceptibles de les affecter. Il n’y aura donc plus d’automaticité du prononcé de la nullité.
Un « triple test » est, en revanche, mis en place au sein d’un nouvel article 1844-12-1 du code civil. Avant de prononcer la nullité d’une décision sociale, le juge devra procéder tout d’abord au contrôle du grief du demandeur, qui doit établir que l’irrégularité a lésé ses intérêts, puis au contrôle de l’influence de l’irrégularité sur le sens de la décision, et enfin à un contrôle de proportionnalité, qui met en balance les conséquences de l’irrégularité et celles de l’annulation de la décision (C. civ., art. 1844-12-1, créé par ord., art. 5).
Un meilleur encadrement des causes de nullité
Les causes de nullité ont été revues afin d’identifier celles qui échapperont au contrôle du juge. Dans ces hypothèses, l’application du « triple test » du nouvel article 1844-12-1 sera expressément écartée.
Le nouvel article 1844-10 du code civil précise, d’une part, que la nullité des décisions sociales (terme utilisé désormais en lieu et place des « actes et délibérations ») ne pourra résulter que de la violation d’une disposition impérative de droit des sociétés, à l’exception du dernier alinéa de l’article 1833 du même code qui prévoit que la société est gérée dans son intérêt social, en prenant en considération les enjeux sociaux et environnementaux de son activité, ou de l'une des causes de nullité des contrats en général.
D’autre part, sauf si la loi en dispose autrement, la violation des statuts ne constituera pas une cause de nullité.
Des annulations en cascade à éviter
Les effets des nullités sont, par ailleurs, mieux encadrés afin d’éviter les risques, sur le fonctionnement des sociétés, des nullités dites « en cascade ».
L’ordonnance généralise les règles spécifiquement élaborées pour les sociétés par actions, en prévoyant que, sauf disposition législative contraire, les irrégularités de désignation ou de composition d’un organe social n’entraîneront pas, par elles-mêmes, la nullité des décisions subséquentes (C. civ., art. 1844-15-1, créé par ord., art. 8).
La réforme autorise également le juge à différer dans le temps les effets de la nullité si ses effets sont manifestement excessifs pour l'intérêt social (C. civ., art. 1844-15-2, créé par ord., art. 8).
Un délai de prescription raccourci
Le délai de droit commun de la prescription de l’action en nullité en droit des sociétés sera réduit de 3 à 2 ans (C. civ., art. 1844-14 mod. par ord., art. 6).
Ord. n° 2025-229, 12 mars 2025 : JO, 13 mars
Rapport au Président de la République, ordonnance du 12 mars 2025 : JO, 13 mars
Site EditionsLégislatives 07/04/2025