


« L’exploration en France d’hydrogène naturel doit être accélérée »
Publié le 07.05.2025
Lors de vos différentes interventions sur le sujet, vous soulignez que certains pays sont plus à l’aise avec leurs ressources énergétiques. Ce n’est pas le cas de la France ?
Nous avons trop une culture de la chemise blanche, avec des industries lourdes que nous avons laissées partir depuis cinquante ans dans d’autres pays. C’est encore plus vrai pour notre sous-sol, avec des mines qui sont fermées depuis longtemps. Mais la crise sanitaire en 2020, la guerre en Ukraine, nous rappellent l’importance de l’autonomie énergétique. Surtout, nous avons sur le territoire hexagonal des terres rares, du lithium dont la première exploitation va peut-être bientôt démarrer. Et bien sûr ces potentiels gisements d’hydrogène natif qui ont été mis à jour et dont nous devons accélérer l’exploration si nous voulons une production future.
La France a-elle toujours les compétences techniques pour exploiter ces ressources ?
Nous avons perdu une partie des connaissances que nous avions dans ce domaine, notamment en ce qui concerne les forages. En revanche, nous comptons de grosses entreprises, comme Orano, Total Energies, SLB, qui, elles, travaillent à l’international et possèdent toujours ces compétences techniques. Autre frein, les métiers de mineur, de foreur sont mal considérés, jugés pénibles physiquement, dangereux, impactant la santé. Mais les conditions ont changé, les environnements de travail sont plus sûrs. Surtout il faut revaloriser les salaires dans ce secteur pour attirer de futurs employés.
Le droit minier, très complexe, est-il un frein à l’exploitation de l’hydrogène blanc ?
En France, le sous-sol a été nationalisé depuis une modification du code minier en 1810. Seul l’Etat peut octroyer un permis d’explorer, puis une concession pour l’exploitation. Il faut en moyenne 18 mois pour le premier, trois ans pour la seconde. Contre quelques mois au total pour l’Allemagne par exemple.
Les Pyrénées possèdent plusieurs permis d’exploration d’hydrogène natif. Pourquoi cette richesse ?
L’hydrogène se forme par oxydation, le plus souvent de roches riches en fer. Dans l’avant-pays pyrénéen, en raison de la formation de la chaine de montagne qui a fait remonter des couches géologiques, des ressources d’H2 ont été détectées. Cinq demandes de permis d’explorer ont été déposées, par des petites compagnies, dont un partenariat avec Engie.
La mise en place d’un marché international de l’hydrogène naturel est-elle envisageable ?
Je ne pense pas car ce gaz voyage mal. Alors que le méthane se liquéfie assez facilement, est transporté à bord de gros méthaniers qui utilisent d’ailleurs une petite partie leur cargaison comme carburant, ce n’est pas le cas de l’hydrogène. Il faut beaucoup d’énergie pour qu’il soit amené à l’état liquide, ce qui est une aberration économique. D’où l’intérêt de le valoriser à proximité des sites d’exploitation. Dans des usines d’engrais par exemple, ce qui intéresse l’agriculture.
Que faut-il faire au niveau national pour développer et soutenir cette filière ?
Il faut l’aider à croître rapidement en utilisant les acteurs et les guichets en place, tout en leur octroyant des fonds. Pour la recherche, le PEPR (Programmes et Équipements Prioritaires de Recherche) « sous-sol bien commun » peut être le bon outil si une partie de son budget est orientée vers ce sujet. Quelques millions d’euros suffiraient pour faire une évaluation à grande échelle des zones prospectives. Enfin, il faudrait aider les entreprises qui ont commencé l’exploration. Le coût des puits à forer est relativement bas, en comparaison de forages profonds en mer.
Site LaFranceAgricole - Actualités 28/04/2025