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Imposition des revenus des gérants majoritaires de Selarl : le Bofip partiellement annulé

Est annulée la doctrine administrative qui admet que les gérants majoritaires de Selarl retiennent un forfait de 5 % de leurs rémunérations d’ensemble perçues au titre de leurs activités libérale et de gérance en tant que revenus afférents à la gérance. Il en est de même de celle selon laquelle certaines tâches, telles que la prise de rendez-vous ou la facturation du client, sont systématiquement considérées comme inhérentes à l’activité libérale.

Saisi d’un recours pour excès de pouvoir, le Conseil d’Etat se prononce sur le nouveau cadre fiscal des revenus des associés de sociétés d’exercice libéral (Sel). Rappelons que la doctrine administrative fiscale prévoit, depuis l’imposition des revenus de 2024, que la rémunération des associés de Selafa, Selas, Selarl et Selca perçue au titre de leur activité libérale est déclarée à l’impôt sur le revenu dans la catégorie, en principe, des BNC.

Auparavant, dès lors que ces Sel étaient assujetties à l’impôt sur les sociétés en raison de leur forme, ces revenus étaient imposables dans la catégorie des traitements et salaires ou, pour ce qui concerne les gérants majoritaires de Selarl et les gérants de Selca, dans les conditions prévues à l’article 62 du CGI.

La délicate distinction des activités libérales et de gérance

Une difficulté pratique se pose pour les gérants majoritaires de Selarl et les gérants de Selca. En effet, les revenus qu’ils perçoivent sont susceptibles de rémunérer leur activité libérale et leur activité de gérant. Quel traitement fiscal doit-il alors être appliqué ?

La doctrine de l’administration prévoit deux situations.

Tout d’abord celle dans laquelle les rémunérations en tant que gérant peuvent être distinguées de celles au titre de l’activité libérale. Dans ce cas, les revenus de l’activité libérale doivent en principe être imposés en tant que BNC. A cet égard, l’administration fiscale considère que "les rémunérations perçues au titre de la fonction de gérant sont celles allouées à raison des tâches qui ne sont pas réalisées dans le cadre de l’activité libérale (par exemple : convocation d’assemblée, représentation de la société dans les rapports avec les associés et à l’égard des tiers, décision de déplacement du siège social de la société, etc.)".

L’administration fiscale prévoit aussi celles qui, a contrario, en sont exclues. Selon elle, il s’agit des "tâches de nature administrative qui sont inhérentes à la pratique de l’activité libérale telles que la facturation du client ou du patient, l’encaissement, les prises de rendez-vous, les approvisionnements de fournitures, la gestion des équipes ou la rédaction de documents tels que des ordonnances de prescription". Cette position "générale et en toutes circonstances" sur certaines de ces tâches n’est pas suivie par le Conseil d’Etat, qui la juge illégale. Il annule ainsi les mots "la facturation du client ou du patient, l’encaissement, les prises de rendez-vous, les approvisionnements de fournitures, la gestion des équipes" figurant au no 530 du BOI-RSA-GER-10-30.

La deuxième situation prévue par la doctrine administrative est la suivante : "Lorsque les rémunérations qui sont allouées à raison de l’exercice d’une activité libérale ne peuvent pas être distinguées de celles perçues au titre des fonctions de gérant, elles sont imposées dans les conditions prévues à l’article 62 du CGI. Dans ce cas, l’intéressé doit être en mesure de fournir par tout moyen l’ensemble des éléments de preuve permettant de justifier de cette impossibilité".

En outre, l’administration admet "à titre de règle pratique, qu’une part de 5 % de la rémunération d’ensemble perçue par les gérants majoritaires de Selarl et les gérants de Selca au titre de leurs activités libérale et de gérance correspond aux revenus afférents à leurs fonctions de gérant, imposables dans les conditions de l’article 62 du CGI, qu’il soit possible de les distinguer ou non de la rémunération technique". Pour le Conseil d’Etat, "ces énonciations, qui ajoutent à la loi, sont illégales". Elles sont donc annulées.

Il est à penser que : Les professionnels devraient pouvoir, s’ils y ont intérêt, invoquer pour l’imposition des revenus de 2024 la doctrine administrative ainsi annulée. En effet, en dépit de l’effet rétroactif qui s’attache à l’annulation pour excès de pouvoir, les dispositions de l’article L 80 A du LPF permettent à un redevable, alors même que serait ultérieurement intervenue l’annulation par le juge de la doctrine, de se prévaloir de l’interprétation qui, dans les conditions prévues par cet article, était formellement admise par l’administration. L’article L 80 A du LPF permet en effet aux contribuables de se prévaloir d’une doctrine non rapportée à la date du fait générateur de l’imposition, c’est-à-dire au 31 décembre de l’année d’imposition en matière d’impôt sur le revenu.

Doctrine administrative pour les gérants majoritaires de Selarl et les gérants de Selca : ce qui est annulé

 

Rémunérations relevant de la catégorie des BNC

Rémunérations relevant de l’article 62 du CGI

Ce que prévoit la doctrine administrative (Bofip)

Rémunérations perçues au titre de l’activité libérale, y compris les "tâches de nature administrative qui sont inhérentes à la pratique de l’activité libérale telles que " :

► la facturation du client ou du patient ;

► l’encaissement ;

► les prises de rendez-vous ;

► les approvisionnements de fournitures ;

► la gestion des équipes ;

► la rédaction de documents tels que des ordonnances de prescription.

► Rémunérations perçues au titre de l’activité de gérance. Cela renvoie aux "tâches qui ne sont pas réalisées dans le cadre de l’activité libérale".

Exemples :

♦ la convocation d’assemblée ;

♦ la représentation de la société dans les rapports avec les associés et à l’égard des tiers ;

♦ la décision de déplacement du siège social de la société

► Rémunérations qui sont allouées à raison de l’exercice d’une activité libérale qui ne peuvent pas être distinguées de celles perçues au titre des fonctions de gérant.

► Il est admis, à titre de règle pratique, qu’une part de 5 % de la rémunération d’ensemble perçue par les gérants majoritaires de Selarl et les gérants de Selca au titre de leurs activités libérale et de gérance correspond aux revenus afférents à leurs fonctions de gérant, imposables dans les conditions de l’article 62 du CGI, qu’il soit possible de les distinguer ou non de la rémunération technique (BOI-RSA-GER-10-30 no 550).

Ce qui est annulé par le Conseil d’Etat

Le Conseil d’Etat juge illégal de considérer que les tâches suivantes sont, "de manière générale et en toutes circonstances", inhérentes à la pratique de l’activité libérale :

► la facturation du client ou du patient ;

► l’encaissement ;

► les prises de rendez-vous ;

► les approvisionnements de fournitures ;

► la gestion des équipes ;

Les mots correspondant à ces tâches sont donc annulés du Bofip.

La règle ci-dessus selon laquelle il est admis que 5 % de la rémunération d’ensemble correspondent aux revenus perçus au titre de l’activité de gérance est considérée comme un ajout à la loi. Cette règle illégale est annulée.

CE 8-4-2025 n° 492154 - L'@ctualité en ligne, www efl.fr 15/04/2025

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