


Appréciation de la conformité du contrat conclu hors établissement remis au consommateur
Publié le 03.04.2025
Un particulier conclut hors établissement un contrat de fourniture et d’installation d’une centrale photovoltaïque qu’il finance par un prêt souscrit auprès d’une banque. Invoquant des irrégularités du bon de commande, il demande l’annulation des contrats de vente et de crédit.
Saisie du litige, et appliquant d’anciennes dispositions du Code de la consommation, mais les solutions sont transposables au régime actuel des contrats hors établissement, la Cour de cassation censure l’arrêt d’appel qui avait rejeté les demandes du particulier.
La remise d’un contrat non conforme au consommateur entraîne la nullité du contrat
En matière de contrat conclu hors établissement, le professionnel doit fournir au consommateur un exemplaire daté du contrat contenant notamment les informations précontractuelles prévues à l’article L 221-5 du Code de la consommation. A défaut, le contrat est nul.
Doit donc être censuré l’arrêt d’appel qui écarte la nullité au motif que la méconnaissance des dispositions relatives à l’information précontractuelle du consommateur est sanctionnée par une amende administrative et non par la nullité du contrat.
La solution, tout comme l’erreur commise par la cour d’appel, tient à la structure un peu complexe des textes régissant les contrats conclus hors établissement, que ce soit à la date du contrat litigieux (2018) ou maintenant.
Les informations à communiquer au consommateur avant la conclusion du contrat sont fixées par l’article L 221-5 du Code de la consommation qui renvoie pour certaines d’entre elles à l’information générale précontractuelle due pour tout contrat conclu entre un professionnel et un consommateur. Le non-respect de cette obligation – tout comme le manquement à l’obligation d’information générale – donne lieu à une amende administrative et non à l’annulation du contrat, sauf si le consentement du consommateur a été ainsi vicié.
Mais dans l’affaire commentée, le consommateur ne réclamait pas que le vendeur soit sanctionné pour un manquement à cette obligation mais pour ne pas lui avoir remis un contrat conforme aux exigences légales, c’est-à-dire reprenant les informations précontractuelles prévues par les textes précités. Le non-respect de cette obligation-là est bien sanctionné par la nullité du contrat et expose également le professionnel à des sanctions pénales.
Le consommateur n’a pas à prouver qu’il a subi un préjudice
4. Pour rejeter la demande d’annulation des contrats, la cour d’appel avait également relevé que le particulier, qui avait réceptionné l’installation sans réserves, ne justifiait pas d’un préjudice résultant des irrégularités invoquées. Ce raisonnement est censuré par la Haute Juridiction : en se prononçant ainsi les juges du fond ont ajouté à l’article L 242-1 du Code de la consommation une condition qu’il ne prévoit pas.
Le professionnel peut toutefois échapper à la nullité s’il prouve que le consommateur a confirmé le contrat en l’exécutant en connaissance du vice l’affectant. Depuis un revirement de jurisprudence de 2024, la Cour de cassation juge que le consommateur ne peut pas être considéré comme ayant confirmé un contrat irrégulier du seul fait qu’il l’a exécuté volontairement et que le bon de commande reproduisait les dispositions du Code de la consommation prescrivant le formalisme requis. Il faut établir une connaissance effective du vice par le consommateur.
Le contrat doit indiquer un délai d’exécution pour chaque prestation
En l’absence d’exécution immédiate d’un contrat conclu hors établissement, celui-ci doit notamment comporter, à peine de nullité, la mention de la date ou du délai auquel le professionnel s’engage à livrer le bien ou à exécuter le service.
La Cour de cassation juge que l’indication d’un délai global dans le contrat ne satisfait pas aux prescriptions légales dès lors qu’il n’est pas distingué entre le délai des opérations matérielles de livraison et d’installation des biens, et celui d’exécution des autres prestations auxquelles le vendeur s’était engagé. Un délai global ne permet pas à l’acheteur de déterminer de manière suffisamment précise quand le vendeur aura exécuté ses différentes obligations.
Lorsque le professionnel s’engage, par un contrat hors établissement, à réaliser plusieurs prestations, ce qui est courant pour une centrale photovoltaïque (livraison et installation de la centrale et prise en charge de formalités administratives), le contrat doit indiquer un délai pour la pose et un délai pour la réalisation des démarches, la mention sur le bon de commande d’un délai global maximal ne permettant pas au consommateur de déterminer précisément quand le professionnel exécutera ses différentes prestations. L’indication d’une date ou d’un délai d’exécution précis s’impose même en l’absence de prestations complémentaires, un délai maximal d’exécution ne suffisant pas.
La mention de la possibilité de recourir à un médiateur doit être précise
Le contrat de vente conclu hors établissement doit comporter, à peine de nullité, une mention relative à la possibilité de recourir à un médiateur de la consommation, ainsi que les coordonnées du ou des médiateurs de la consommation compétents dont le professionnel relève.
Jugé que ne répondait pas à cette exigence la mention suivante figurant sur le bon de commande : « Conciliation préalable : toute contestation portant sur l’exécution du présent contrat ou sur l’interprétation des obligations qui en découlent, devra, obligatoirement et préalablement à toute action judiciaire contentieuse, donner lieu à une tentative de conciliation préalable par-devant tout conciliateur ou médiateur accepté par les parties ou, le cas échéant, désigné par le tribunal ».
En effet, le recours est présenté comme une obligation et non comme une possibilité. Or, si tout consommateur a le droit de recourir gratuitement à un médiateur de la consommation en vue de la résolution amiable du litige qui l’oppose à un professionnel, est interdite toute clause ou convention obligeant le consommateur, en cas de litige, à recourir à une médiation préalablement à la saisine du juge.
Cass. 1e civ. 22-1-2025 n° 23-12.537 F-D - L’@ctualité en ligne, www .efl.fr 21/03/2025